Les 23 et 24 septembre 1961, le général de Gaulle est en Ardèche
La transformation du pays et sa modernisation sont des thèmes martelés dans ses déplacements depuis son retour au pouvoir ; l’Ardèche est alors vue comme un département largement rural et peu équipé. Le journal Libération du 20 septembre 1961 titre : « À l’occasion du voyage du président de la République, le désert français a décidé de mériter son nom » ou plus sobrement les Echos : « Voyage au désert ». La presse nationale souligne le retard dans les équipements collectifs et la crainte des Ardéchois de rester à l'écart du développement économique. Le programme du voyage présidentiel est chargé : le 23 septembre, visites à Aubenas, Largentière et Privas, le lendemain, Tournon-sur-Rhône et Annonay. Le président prononcera des discours, rencontrera les personnalités et se prêtera à des bains de foule.
C'est dans un climat de défiance que le président est attendu. Les partis de gauche, une partie de la droite modérée, les syndicats de salariés et agricoles, les anciens combattants et les présidents des chambres consulaires appellent au boycott ou laissent le choix à leurs adhérents de répondre à l'invitation du président. Les revendications sont nombreuses : salaires, politique agricole, défense des service publics, retard dans les équipements collectifs, paix en Algérie... Les maires sont invités à pavoiser les édifices, faire sonner les cloches et organiser l'accueil avec la population, les notabilités et les enfants sur le parcours présidentiel. Certains maires de communes boycottent la visite comme à Barnas et Lalevade. Dans l'arrondissement de Tournon, 39 maires sur 110 déclineront l'invitation du président à la sous-préfecture. Les syndicats d'enseignants appellent leurs adhérents à refuser l'accompagnement de leurs élèves. Autres inquiétudes plus graves, l'OAS menace par tracts, courriers anonymes et inscriptions sur la voie publique, de s'en prendre au cortège officiel et au public. Plus de 600 gendarmes et policiers sécurisent donc le déplacement présidentiel.
La crainte pour le préfet et l'Elysée est que ce climat de défiance n’influe sur l’accueil de la population et qu'il ne soit pas à la hauteur des attentes. Il n'en est rien. Le Réveil du Vivarais, hebdomadaire opposé à la politique du général, reconnaît malicieusement, dans un article du 30 septembre 1961 : « Le Général est passé », que la curiosité l'a emporté et « le besoin aussi de dire à l'Homme du 18 juin 1940, sa reconnaissance et son admiration», tout en oubliant le présent1.
1 Archives départementales de l’Ardèche, Per 1644 18.