La famille Briand à Aubenas, du moulinage à la construction mécanique

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Issu d’une famille paysanne, Joseph Casimir Briand rompt avec la tradition familiale et s’installe comme moulinier dans le quartier Saint-Pierre à Aubenas dans le dernier quart du XIXe siècle. Son fils, Léon Henri, né en 1872, devient contremaître aux établissements Paul Dumas à Saint-Etienne-de-Fontbellon et afferme les usines Saint-Arcons-Bacciochi dans le quartier Saint-Pierre. Il y relance la production pendant la guerre de 1914-1918. La soie artificielle (appelée aussi viscose ou rayonne) obtenue à partir de cellulose de bois voit, après la guerre, sa production se développer et pendre la place de la soie naturelle dans les moulinages.

Dans les années 1920, Léon Briand crée donc les établissements Briand et fils et procède à l’électrification des usines. C’est dans ce quartier Saint-Pierre que Léon Briand, relayé par ses deux fils Henri et Joseph, construit une usine moderne et étend le « royaume ». Les Briand contrôlent alors les usines Saint-Arcons-Bacciochi et celles de la succession Soubeyrand. À cela s’ajoutent la fabrique du Touroulet à Saint-Sernin, des usines à Joyeuse, Lavilledieu et Largentière avec le rachat des anciens établissements Palluat. Après 1945, les fibres synthétiques (nylon ou tergal) se développent et remplacent la soie artificielle. Les fils Briand implantent leur siège social à Lyon.

En 1947, Louis Sabaton, contremaître aux usines Briand, et Henri et Joseph Briand signent une convention autorisant Louis Sabaton à faire breveter en son nom personnel le procédé de broche dites « double torsion », un système d’arrêt de la bobine et de tous ses accessoires. Mais en 1948, Henri Briand et son fils aîné Pierre se tuent dans un accident d’avion. Joseph Briand reste seul pour continuer l’œuvre entreprise par son frère.

En complément du textile, les établissements Briand se lancent dans la construction mécanique. Dans les années 1950, un atelier de recherche est créé pour la mise au point du procédé de broches double torsion breveté et la production en petites séries de différents types de broches et de moulin. Les premiers essais de texturation du nylon sont entrepris. En 1955, le procédé « double torsion » est abandonné et des machines « fausse torsion » sont conues en petites séries. Des essais à l’échelle industrielle sont entrepris, sous la direction de Louis Sabaton dans les moulinages Briand.

 

Après le décès de Léon Briand en 1956, l’entreprise est divisée en deux entre Joseph Briand et la famille d’Henri Briand. Le département machine textile est attribué à la fille d’Henri Briand qui a épousé Guy Batsch. Ce dernier dirige le département et la production des machines fausse torsion avant de créer en 1958 la société Sotexa (Société mécanique et textile de l’Ardèche). La coopération technique des établissements Briand Joseph et de la société Sotexa s’est poursuivie jusqu’en 1963, date à laquelle la séparation des deux parties de l’entreprise Léon Briand et fils a été complète. Dans les années 1960, la Sotexa s’équipe d’ateliers modernes ; elle compte 450 salariés en 1970. La Sotexa et ses deux principaux concurrents, les Ateliers Roannais de Construction Textile (ARCT) et les établissements Bourgeas (devenus ACBF par fusion en 1965) exportent leurs machines dans le monde entier. Pour faire face à la concurrence, ces trois fabricants se regroupent et donnent naissance à plusieurs groupes successifs.

 

Joseph Briand, quant à lui, participe avec les usines dont il a hérité à la société Les moulinages de France qui construit un ensemble industriel (moulinage, atelier de teinture, magasin d’expédition) sur le site historique des usines Briand. L’ensemble est contrôlé par différents groupes, le dernier étant Rhône-Poulenc Textile. La famille Briand quitte l’Ardèche dans les années 1970 pour l’Isère où elle fonde le moulinage Textile Briand.

 

Les archives données par Robert Aussenac, bien que lacunaires, sont un témoignage de cette histoire. Près d’une centaine de photographies des années 1930 aux années 2000 illustre cette aventure industrielle.

 

Sources

MOREL, Yves, Les Maîtres du fil. Histoire du moulinage vivarois du XVIIIe siècle à nos jours, Mémoire d’Ardèche et Temps Présent, Privas, 2002.

AUSSENAC, Robert, Une aventure industrielle à Saint-Pierre-sous-Aubenas au XXe siècle, in Textiles d’Ardèche. Éléments pour une histoire de l’industrie textile, Cahiers de Mémoire d’Ardèche et temps Présent, n°87, août 2005.